L’impact du numérique

17 Oct 2023

L’Agence de la transition écologique (Ademe) et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) ont été missionnées pour mesurer l’empreinte environnementale du numérique en France et évaluer son évolution d’ici à 2050.

Le secteur représenterait aujourd’hui 2,5 % de l’empreinte carbone de la France. Si rien n’est fait pour limiter cette empreinte environnementale, elle pourrait augmenter de manière significative d’ici à 2040 (+ 60 % selon le rapport de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique du Sénat, pour représenter 6,7 % des émissions de GES nationales)

Voici les principaux enseignements de cette étude :

L’Ademe et l’Arcep évaluent à 800 millions le nombre d’équipements utilisateurs personnels et professionnels en France, en 2020. Ces équipements, aussi appelés « terminaux« , regroupent téléviseurs, smartphones, ordinateurs, tablettes, imprimantes, consoles de jeux, box TV, objets connectés…

  • Selon l’indicateur environnemental considéré, les terminaux (et en particulier les écrans et téléviseurs) sont à l’origine de 65 à 90 % de l’impact environnemental. Viennent ensuite les centres de données (entre 4% et 22% des impacts) et les réseaux (entre 2% et 14 %).

  • De toutes les étapes du cycle de vie des biens et services considérées, la phase de fabrication est la principale source d’impact (78 % de l’empreinte carbone), suivi de la phase d’utilisation (21 % de l’empreinte carbone), concentrant souvent à elle deux jusqu’à 100 % de l’impact environnemental, selon l’indicateur environnemental considéré. Ce point confirme d’ailleurs l’importance des politiques publiques et réglementaires pour allonger la durée d’usage des équipements numériques à travers la durabilité des produits, le réemploi, le reconditionnement, l’économie de la fonctionnalité ou la réparation.
  • En plus des impacts liés à la consommation énergétique (empreinte carbone, radiations ionisantes et épuisement des ressources abiotiques fossiles), le numérique a également un effet considérable sur l’épuisement des ressources abiotiques naturelles (minéraux & métaux), représentant 27 % de son impact.

Source

L’empreinte matières peut être calculée selon la méthode de l’analyse du cycle de vie (production, utilisation, élimination) d’un produit donné. D’après le Wuppertal Institut, les 120 grammes que pèse notre téléphone portable, riche en métaux précieux (or, argent, palladium…) et rares (lithium, tantale, cobalt…), très couteux et difficiles à extraire, auront nécessité 70kg de matières, mobilisant plus de 70 matériaux différents. Source

Concernant la fabrication, les impacts sont conséquents pour deux raisons principales :

  • Les équipements relatifs aux services numériques sont très demandeurs en énergie pour leur fabrication. Cette énergie est principalement produite dans les pays avec un mix énergétique fortement carboné (comme en Asie ou aux Etats-Unis), ce qui entraîne de forts impacts.
  • Ces équipements utilisent une quantité importante de métaux stratégiques. Ces matériaux requièrent également beaucoup de ressources et d’énergie pour leur extraction et génèrent beaucoup de déchets. Cela explique les impacts élevés sur les ressources et la production de déchets.

Concernant l’utilisation, les impacts viennent majoritairement de la consommation d’électricité. L’impact du transport est quant à lui marginal relativement aux phases d’utilisation et de fabrication du numérique.

Quels sont les principaux impacts environnementaux des services numériques en France en 2020 ?

  • Les services numériques sont responsables de 2,5% de l’empreinte carbone de la France et de 10% de la consommation électrique française
  • 62,5 millions de tonnes de ressources sont utilisées par an pour produire et utiliser les équipements numériques.
  • La masse de matériaux déplacée durant la phase de fabrication est égale à 932 kg / habitant.
  • 20 millions de tonnes de déchets produits par an sur l’ensemble du cycle de vie
  • La production de déchets est égale à 299 kg / habitant sur l’ensemble du cycle de vie des équipements (de leur fabrication à leur fin de vie).
  • Les impacts moyens annuels de l’utilisation du numérique sur le changement climatique sont similaires à 2 259 km en voiture / habitant.

Chaque année, les Français achètent 3 millions d’équipements numériques, ce qui équivaut à un peu plus de 8 000 par jour, un chiffre considérable compte tenu de la population française. Dans nos nouvelles pratiques, nous utilisons de plus en plus d’objets connectés tels que les montres connectées, les frigos connectés, les systèmes de réalité augmentée jusqu’aux machines à laver connectées. Même si tous ces objets représentent une valeur ajoutée à la vie quotidienne et/ou professionnelle, les impacts du numérique sont importants, à bien des égards.

Pour réduire l’impact environnemental du numérique, il faut favoriser la soutenabilité de la production, encourager l’écoconception des équipements et éviter le renouvellement rapide des équipements. Compte-tenu de l’impact de la phase de production, il est nécessaire d’allonger la durée de vie des équipements en favorisant le ré-emploi et la réparabilité, et de réduire tout type d’obsolescence. 

On distingue différents types d’obsolescence :

  • Obsolescence directe ou obsolescence programmée : mise en place par les fabricants, elle vise à rendre les appareils obsolètes au bout d’un certain temps, et ce de manière totalement volontaire. L’objectif étant de pousser à l’achat d’un nouvel appareil.
  • Obsolescence indirecte : elle ne touche pas l’appareil dans ses composants. Le produit n’est plus utilisable à cause d’un produit associé qui ne fonctionne plus et qui n’est ni réparable ni remplaçable. Exemple : un chargeur de téléphone plus commercialisé.
  • Obsolescence par incompatibilité : cette obsolescence est souvent rencontrée quand on garde nos appareils numériques assez longtemps. Cela arrive lorsque les nouveaux systèmes d’exploitation ne peuvent être installés faute de comptabilité du système d’exploitation.
  • Obsolescence perçue, esthétique ou psychologique : trop souvent les appareils électroniques sont remplacés, alors qu’ils fonctionnent encore très bien. Selon l’ADEME, 88 % des français changent leur téléphone portable alors qu’il fonctionne encore*. Mais ils sont perçus comme étant dépassés, ne fonctionnant pas aussi vite que les derniers modèles ou possédant des caractéristiques moins avancées. Ce sont tout simplement les utilisateurs qui rendent leurs appareils obsolètes car ils souhaitent s’en séparer, avant même leur fin de vie technique. On change en moyenne notre téléphone portable tous les deux ans et multiplions nos appareils électroniques dans nos tiroirs. D’après un sondage demandé par Back Market réalisée par OpinionWay en 2016, il existerait “100 millions de téléphones qui dorment dans nos tiroirs” alors qu’ils sont encore en état de marche.

Alors que les fabricants doivent travailler sur les 3 premiers types d’obsolescence, nous portons la responsabilité de la 4ème et pouvons ralentir la vitesse à laquelle nous changeons nos appareils.

Pour tout comprendre des enjeux et impacts du Numérique, nous vous recommandons de participer à un atelier de La Fresque du Numérique

*Guide Les impacts du smartphone – ADEME

Sources étude Ademe-Arcep :

Image par Mariakray de Pixabay