Avec plus de 100 milliards de vêtements produits chaque année dans le monde (une production qui a doublé entre 2000 et 2014 et qui devrait progresser de 63% d’ici à 2030 si nous maintenons ce rythme), la durabilité de l’industrie de la mode est plus que remise en question (source : Ademe « La mode sans dessus dessous »). Le secteur du textile vogue au gré du renouvellement permanent et très rapide des collections, affichant des prix de plus en plus bas alimentant ainsi notre dévorante envie de nouveauté ! Pour certains, s’habiller c’est juste une obligation sociale, pour d’autres, une véritable passion. Nos vêtements expriment une part de notre personnalité, de notre humeur, et cela change au fil du temps, voire d’un jour à l’autre, nous incitant à renouveler notre garde-robe très souvent.
Avec la fast fashion (renouvellement très rapide des collections à prix très bas, basée sur l’hyperconsommation), la quantité de vêtements produits et jetés a explosé.
Or, si elle génère de nombreux emplois (1 million dans le monde) il faut savoir que la mode est l’une des industries les plus polluantes de la planète.
- 4 Milliards de tonnes d’équivalent CO₂ par an, ce sont les émissions générées par l’industrie textile (vêtements et chaussures) – C’est plus que l’impact des vols internationaux et le trafic maritime réunis.
- 3e secteur consommateur d’eau dans le monde, après la culture de blé et de riz
Le Parlement européen a réalisé une étude sur la filière textile dont voici les principaux enseignements :
Plus de 12 kg de vêtements par an pour un Européen
Selon l’Agence européenne pour l’environnement (EEA), la quantité de vêtements achetés dans l’Union européenne (UE) a augmenté de 40 % entre 1996 et 2012. En 2015, les Européens ont acquis 6,4 millions de tonnes de nouveaux habits et chaussures, selon une étude du Parlement européen. A l’échelle mondiale, la tendance est la même : 100 milliards de vêtements ont été consommés dans le monde en 2014, selon Greenpeace. Cette frénésie de consommation connaît un bond depuis les années 2000.
3ème secteur consommateur d’eau dans le monde
Nécessaire à toutes les étapes de fabrication d’un vêtement, l’eau est aussi indispensable pour appliquer teintures et produits chimiques. La production textile est ainsi très gourmande en eau, et exige en outre des terres pour cultiver le coton et d’autres fibres. On estime qu’en 2015, l’industrie mondiale du textile et de l’habillement a utilisé 79 milliards de mètres cube d’eau, les besoins en eau de toute l’économie européenne en 2017 s’étant élevé à 266 milliards de mètres cube.
Selon des estimations, la fabrication d’un seul t-shirt en coton nécessite 2 700 litres d’eau douce, soit l’équivalent de 70 douches ou ce qu’une personne boit en 2,5 ans. Un rapport des Nations unies estime qu’il faut 7 500 litres d’eau pour fabriquer un jean, soit l’équivalent de l’eau bue par un être humain pendant 7 ans.
Le secteur textile était la troisième plus grande source de dégradation de l’eau et d’utilisation des terres en 2020. Cette année-là, il a fallu en moyenne neuf mètres cubes d’eau, 400 mètres carrés de terrain et 391 kilogrammes (kg) de matières premières pour fournir des vêtements et des chaussures pour chaque citoyen de l’UE.
Pollution de l’eau
On estime que la production textile est responsable d’environ 20 % de la pollution mondiale d’eau potable, à cause des teintures et autres produits de finition. De nombreux vêtements bon marché sont traités avec des produits chimiques pour les teindre ou les rendre plus résistants. Non seulement ces produits sont toxiques pour ceux qui les fabriquent et pour les consommateurs, mais ils le sont aussi pour l’écosystème aquatique qui les reçoit lorsque les habits sont lavés. Des produits chimiques qui fragilisent encore un peu plus les écosystèmes aquatiques.
Impacts à l’utilisation
L’une des étapes souvent sous-estimée est celle de l’utilisation, et notamment du lavage.
Les vêtements synthétiques (fabriqués à base de pétrole – le polyester représente 70% de la production de fibres issues du pétrole) sont responsables de 35 % des microplastiques primaires rejetés dans l’environnement. Une seule lessive de vêtements en polyester peut libérer 700 000 fibres microplastiques, ces particules trop petites pour être filtrées par les stations d’épuration, finissent donc leur course dans l’océan. C’est la principale source de pollution plastique des océans.
La majorité des microplastiques des textiles est libérée lors des premiers lavages. La fast fashion est basée sur une production de masse, des prix bas et des volumes de vente élevés qui favorisent de nombreux premiers lavages.
Le lavage des produits synthétiques a provoqué l’accumulation de plus de 14 millions de tonnes de microplastiques au fond des océans.
Émissions de gaz à effet de serre
On estime que l’industrie de la mode est responsable de 10 % des émissions mondiales de CO2, soit plus que l’ensemble des vols et transports maritimes internationaux.
Selon l’Agence européenne pour l’environnement, les achats de textile dans l’UE en 2020 ont généré des émissions de CO2 équivalentes à 270 kg par personne. Cela signifie que les produits textiles consommés dans l’UE ont généré des émissions de gaz à effet de serre de 121 millions de tonnes.
Les déchets textiles finissent dans les décharges et le taux de recyclage est faible
La façon dont les personnes se débarrassent des vêtements dont elles ne veulent plus a aussi changé: elles ont aujourd’hui davantage tendance à les jeter qu’à les donner. Moins de la moitié des vêtements usagés est collectée pour être réutilisée ou recyclée, et seulement 1 % est recyclé en vêtements neufs, car les technologies qui permettraient de recycler les vêtements en fibres vierges commencent seulement à émerger.
Entre 2000 et 2015, la production de vêtements a doublé, tandis que l’utilisation moyenne d’un vêtement a diminué.
Les Européens consomment près de 26 kg de textiles par an et en jettent environ 11 kg. Les vêtements usagés peuvent être exportés en dehors de l’UE, mais la plupart (87 %) sont incinérés ou mis en décharge.
Impacts sociaux
Au delà de la pollution générée, la production de vêtements a également des impacts sociaux avec des conditions sociales encore difficiles pour les travailleurs (conditions de travail, salaire, travail des enfants…). Les conditions de production des travailleurs ont évolué sur les questions sécuritaires et salariales depuis l’effondrement du Rana Plaza en 2013 (qui avait permis d’instaurer le Devoir de Vigilance en France) qui avait fait plus de 1000 morts, mais cela reste encore minime et insuffisant. Les manifestations ouvrières et les grèves se poursuivent. En janvier 2019, cinquante-deux usines au Bangladesh ont été bloquées par les ouvriers réclamant de meilleurs salaires.
Sources : données du Parlement Européen ; données de l’ADEME
Des conseils pour agir à notre échelle
Vous souhaitez agir pour une mode plus durable ? Plusieurs actions pour réduire l’impact de la fast fashion sur l’environnement sont à notre portée.
1) Changez nos habitudes de consommation
La première chose à faire est d’acheter moins mais mieux (méthode BISOU). C’est d’abord se poser systématiquement la question avant un achat « en ai-je vraiment besoin ? ». Vous verrez qu’en réalité, beaucoup d’achats peuvent être évités, ou au moins reportés !
Il y a aussi de bonnes habitudes à prendre pour choisir des vêtements qui dureront plus longtemps :
- Si vous avez le choix, préférez des matières naturelles :
- laine
- coton bio (qui limite l’utilisation de pesticides très utilisés dans la culture du coton traditionnel),
- lin (la France est le premier producteur mondial de lin – certaines marques tentent de recréer une filière de lin en France comme LINportant ou Gratitude), etc.
- Préférez des « basiques » qui se démodent moins vite et que vous pourrez garder longtemps.
- Misez sur les produits durables : évitez les produits à prix très bas que vous ne porterez qu’une saison
- Sélectionnez des marques qui produisent de manière responsable (choix des matières premières, réduction de l’impact environnemental et social…)
- Préférez des labels sélectionnés par l’Ademe, qui garantissent que le produit est certifié et est plus respectueux de l’environnement. Retrouvez tous les labels analysés par l’Ademe, vous permettant de faire des choix éclairés.
2) Devenez adepte de la seconde main
Il existe aujourd’hui de nombreuses solutions pour acheter de seconde main et allonger la durée de vie des textiles permettant de réduire leur impact. Ressourceries, recycleries, Vinted, Label Ammaüs… Des solutions vous permettant d’acheter mais aussi de donner une seconde vie à vos vêtements.
3) Réparez plutôt que jeter
Un trou dans un pull, une fermeture éclair cassée, et on vite envie de jeter ces vêtements. Et pourtant, si vous n’êtes pas adepte de la couture, des solutions existent sur le territoire pour réparer ou remettre au goût du jour des textiles abimés ou passés de mode. N’hésitez pas à consulter la rubrique « économie locale du site »
4) Favorisez le recyclage
Il existe plusieurs moyens pour recycler vos vêtements :
- les donner à des associations ou organismes qui les revendront en seconde main (Label Emmaüs, recycleries…), ou les redistribueront à des personnes dans le besoin ou les revendront pour récolter des fonds,
- les vendre dans des vide-greniers
- les vendre sur des applications dédiées (Vinted…)
- les vendre à des magasins qui pratiquent la seconde main